Reesor Siding 

CONFLIT SYNDICAL DANS LE NORD DE L'ONTARIO 

Le 11 février 1963, aux premières heures du matin, 3 hommes sont abattus et 8 sont blessés dans un des conflits syndicaux les plus sanglants depuis la grève générale de Winnipeg en 1919.  Cet incident a eu lieu à la Reesor Siding, près de la ville de Kapuskasing dans le Nord de l'Ontario. Les hommes abattus étaient des bûcherons du Syndicat des Bûcherons et Employés de Scieries (LSWU : Lumber and Sawmill Workers Union) qui étaient en grève contre la Spruce Falls Power and Paper.  Les responsables de la fusillade n'étaient pas des policiers ou des hommes de main à l'emploi de la compagnie mais des agriculteurs (colons) qui croyaient protéger leur gagne-pain avec la vente de bois à la Spruce Falls.

Cette grève, d'une durée de trente-trois jours, mettait souvent en opposition frère contre frère et père contre fils dans cette région majoritairement francophone.  Les grévistes s'objectaient aux pratiques des colons car ceux-ci approvisionnaient la Spruce Falls qui continuait à opérer le moulin malgré la grève.  Ceci affaiblissait la position du syndicat dans les négociations, ce qui avait incité les grévistes à utiliser un assortiment de tactiques pour convaincre les colons d'arrêter d'apporter leur bois au moulin.

 

Le Syndicat des Bûcherons et Employés de Scieries (LSWU) avait été créé en 1944. Le syndicat mère de la LSWU était le Syndicat International des Charpentiers et Menuisiers Unis d'Amérique.  Depuis le tout début, les trois sections locales de la LSWU dans le Nord de l’Ontario, soit les sections 2693, 2995 et 2537, avaient toujours négocié conjointement leurs contrats de travail avec les compagnies du bois.  Quand une des compagnies dans la région avait signé un contrat avec leurs employés, les autres compagnies donnaient exactement le même contrat aux leurs. Une cassation de ce système par les compagnies Spruce Falls Power and Paper de Kapuskasing et Kimberly-Clark de Longlac allait devenir la racine de la grève de janvier et février 1963.

La première compagnie à signer un nouveau contrat avec leurs employés pour l'année 1963 était la Abitibi-Price Power and Paper avec ses quatre moulins : Lakehead Woodlands, Smooth Rock Falls, Iroquois Falls et Sault Ste Marie. La nouvelle entente collective comportait une réduction des heures de travail de 44 à 40 heures par semaine, une augmentation de salaire de 10% et plusieurs autres avantages.  Cette entente a été signée au mois de décembre 1962 à la suite de quoi les compagnies Kimberly-Clark de Longlac et Spruce Falls de Kapuskasing ont immédiatement entamé les négociations avec leurs employés.

Le 10 janvier 1963, lors d’une réunion à Toronto devant un agent de conciliation du gouvernement de l'Ontario, la Kimberly-Clark et la Spruce Falls ont chacun présenté une offre au syndicat.  L'offre a été rejetée par l'exécutif et les membres de la LSWU pour plusieurs raisons. Habituellement, la Kimberly-Clark de Longlac et la Spruce Falls présentaient la même offre à leurs employés.  La Kimberly-Clark produisait de la pulpe de sulfate utilisée dans la fabrication du papier de qualité alors que la Spruce Falls produisait du papier journal.  Le secteur de la pulpe de sulfate avait connu une baisse de prix sur les marchés et en conséquence la Kimberly-Clark a demandé un gel de salaire dans son offre à ses 500 bûcherons.  Les 1100 employés de la Spruce Falls, par contre, ont reçu une offre presque identique (salaires, heures de travail) à celle des employés de la Abitibi-Price, mais ils l'ont refusée par acte de solidarité avec les employés de la Kimberly-Clark.

Ils avaient aussi d'autres points de contestations.  Dans son offre, la Spruce Falls demandait la permission de faire travailler les employés 7 jours par semaine pendant les temps d'urgences. Ces temps d'urgences étaient du mois de janvier à mars avant que le dégel du printemps ne rende les chemins impassables.  Cette demande n'était pas dans l'entente collective signée plus tôt entre la Abitibi-Price et ses employés, elle a donc été refusée par les employés de la Spruce Falls.  En outre, les conditions de vie dans les camps de la Spruce Falls était une des raisons principales du refus de l'offre de la compagnie par les syndiqués.  Les bûcherons voulaient une meilleure nourriture, des douches, des dortoirs plus confortables, etc.

Après la réunion du 10 janvier à Toronto, les représentants du syndicat étaient retournés à Kapuskasing pour informer les membres de l'offre de la compagnie.  Le 14 janvier suivant les bûcherons ont déclenché la grève, initialement sans le support ou la permission de l'exécutif du syndicat.  Le syndicat et confrère Joseph Laforce, alors président de la section locale 2995, ont changé leurs positions face à cette grève par trois fois. Initialement l'exécutif du syndicat a refusé de supporter la grève des bûcherons; quelques jours après, l'exécutif a offert son support mais n'offrait aucune assistance financière; finalement l'exécutif a donné son support complet aux grévistes, ce qui comprend la paie de grève.

L'hésitation initiale de l'exécutif envers la grève pouvait être attribuée au fait que la grève avait été déclenchée illégalement.  En 1963, une grève pouvait être déclenchée seulement si un syndicat avait attendu 7 jours après la dernière réunion de conciliation entre la compagnie, le syndicat et un représentant du Département du Travail de l’Ontario, ou si le Ministre du Travail avait annoncé qu'il n'y aurait plus de réunion de conciliation.  La grève a été déclenchée le 14 janvier, soit seulement 4 jours après la dernière réunion de conciliation à Toronto, et le Ministre du Travail n'avait pas fait l'annonce qu'il n'y aurait plus de réunion de conciliation.  La Spruce Falls et la Kimberly-Clark ont donc déclaré que la grève était illégale.

Dès le début de la grève les 2 parties refusaient toute forme de négociation ou de compromis.  Les grévistes refusaient de retourner au travail tant qu'un contrat n'était pas signé et ils voulaient des négociations communes avec la Spruce Falls et la Kimberly-Clark.  La Spruce Falls a annoncé par les médias ses conditions pour entamer les négociations.  Ils stipulaient que la Spruce Falls et la Kimberly-Clark voulaient des négociations séparées, que les bûcherons devaient retourner au travail pendant les pourparlers, et que toutes interventions des grévistes dans les opérations des bûcherons indépendants (colons) soient arrêtées.

Le premier facteur influençant la durée de la grève était le lien entre la Spruce Falls et le quotidien New York Times.  La Spruce Falls était une filiale de la Kimberly-Clark, qui détenait 51% des actions alors que le New York Times détenait l'autre 49%.  Le New York Times achetait environ 30% de tout le papier journal produit à Kapuskasing alors que l'autre 70% était vendu au Washington Star, Philadelphia Inquirer, et au Detroit News.  Quand la grève fut déclenchée à la Spruce Falls, les imprimeurs du New York Times étaient déjà en grève, donc la production de papier de la Spruce Falls était tombée de 30%.  Les heures de travail des employés de l'usine (ils n'étaient pas sous la même entente collective que les bûcherons, donc n'avaient pas été en grève le 14 janvier) avaient baissé à entre 15 et 30 heures par semaine.  La Spruce Falls avait donc besoin de moins de bois et pouvait se permettre d’être inflexible envers les grévistes.

Malgré le fait que les employés du moulin et les bûcherons étaient tous des syndiqués, les gens du moulin (ainsi que les citoyens de Kapuskasing en général)  ne supportaient pas, à l'époque, les bûcherons.  Les bûcherons étaient vus comme ignorants et insignifiants.  S’il y avait eu des sentiments de fraternité entre les deux groupes, les travailleurs du moulin auraient peut-être respecté le piquet de grève qu'avaient fait les bûcherons devant le moulin.  Le résultat aurait été un arrêt complet de production, ce qui aurait encouragé la direction de la Spruce Falls à négocier beaucoup plus tôt.

Le deuxième facteur encourageant l’inflexibilité de la Spruce Falls était qu'elle pouvait compter sur une autre source de bois, soit les agriculteurs de la région.  Les colons fournissaient environ 110,000 cordes de bois, ou environ 25% des 450,000 cordes utilisées par la Spruce Falls annuellement.  La Spruce Falls, en état de production réduite à cause de la grève des imprimeurs du New York Times, pouvait combler ses besoins du moment avec seulement le bois des colons et la réserve de bois sur le terrain du moulin.

Dès le début de la grève, la section locale 2995 du LSWU avait tenté de discuter avec les colons. Des représentants du syndicat les avaient rencontrés pour expliquer que toute hausse de salaire acquise dans une nouvelle entente collective serait nécessairement traduite en une hausse du prix que recevaient les colons pour leur bois.  Si les colons supportaient la grève, la Spruce Falls, avec presque aucun bois, aurait probablement été obligée de négocier beaucoup plus tôt.  Donc la grève aurait été très courte et la perte aux colons aurait été minime. Mais les colons ont refusé toute association avec les grévistes.

Pour comprendre pourquoi les colons ont refusé de coopérer avec les grévistes il faut se rappeler que la grève a débuté en janvier, 1963, soit à l'apogée de la Guerre Froide.  La peur du communisme, la "menace rouge", était déchaînée à cet instant surtout à cause de la crise des missiles du Cuba qui avait eu lieu quatre mois auparavant en octobre, 1962.  Le mythe existait encore à l'époque que le syndicalisme était lié au communisme.

Les grévistes avaient commencé à prendre des actions et ont effectivement empêché les colons d'apporter leur bois au moulin. La situation était grave car le bois devait être sorti avant que les forêts ne deviennent impénétrables avec le dégel printanier.  Le président du Local 2995, confrère Joseph Laforce, avait par contre assuré les gens que le LSWU ne laisserait pas souffrir les colons.  Il a affirmé que le comité de bien-être du syndicat allait s'assurer que les colons auraient de la nourriture et du bois de chauffage gratuitement pendant la durée de la grève.

Le gouvernement n'était pas très actif pendant la phase initiale de la grève.  Le 22 janvier, 10 camionneurs indépendants accompagnés par René Brunelle, membre de l'Assemblée législative provinciale pour la région de Kapuskasing, ont rencontré John Robarts (Premier Ministre de l'Ontario), R.L. Rowntree (Ministre du Travail) et Fred Cass (Procureur Général) à Toronto.  Les camionneurs et Brunelle ont demandé l'assistance du gouvernement pour aider à terminer la grève.  Le gouvernement a nommé, le 4 février, le professeur Bora Lakin de l'Université de Toronto comme médiateur entre la LSWU et la Spruce Falls.

Reesor Siding était une voie de garage du chemin de fer entre Kapuskasing et Hearst.  Elle était utilisée par la Coopérative de Coupe de Val-Rita comme lieu d'entreposage du bois et pour l'embarquer sur les wagons de train. Dans les semaines qui précédaient le matin du 11 février les cordées de bois entreposées à Reesor Siding avaient été renversées à deux reprises par les grévistes; environ 400 cordes avaient été renversées la première fois et 700 la deuxième fois.  En conséquence les colons avaient commencé à monter la garde sur les cordes de bois.

Le soir du 10 février, il y avait 600 cordes de bois à Reesor Siding prêtes à être embarquées sur des wagons.  Les grévistes avaient pris connaissance de ce fait et avaient l'intention d'aller les renverser.  Des agents de la Police Provinciale avaient vu les autos pleines de grévistes se diriger vers Reesor Siding.  Ces agents avaient averti leurs confrères qui étaient près de Reesor Siding et, vers minuit, les policiers étaient arrivés pour avertir les 20 colons qui montaient la garde.  Vers minuit et demi entre 400 et 500 grévistes sont arrivés sur les lieux et, dans l'espace de quelques minutes, 3 grévistes sont morts alors que 8 autres sont blessés sous la fusillade des 20 colons.  Les grévistes n’étaient pas armés.  

Après que les grévistes aient débarqué de leurs voitures, ils ont traversé le cordon de policiers qui essayait, en vain, de les arrêter. Les grévistes s'étaient ensuite avancés vers la chaîne qui servait de barrière, sans toutefois la dépasser.  Soudainement et sans avertissement, les colons ont dirigé une salve vers les grévistes. (Dans l'investigation de l'incident, les policiers avaient trouvé qu'un minimum de 5 des 14 armes à feu trouvées après la fusillade avaient tirées plus d’une fois chacune.)  Les grévistes s'étaient repliés immédiatement, mais 2 d’entre eux étaient morts sur le coup alors qu’un troisième rendait l’âme sur la route vers l'hôpital ; les blessés avaient été apportés à l'hôpital dans les autos des grévistes.

Mais à ce point il est important de demander la question suivante : est-ce que les policiers étaient conscients du fait que les colons étaient armés et auraient-ils pu en avertir les grévistes?  Il semble logique de croire que les policiers auraient dû voir les carabines des colons au moment où ils les ont avertis de la venue des grévistes.  De plus le maire de Kapuskasing avait annoncé dans les médias, le 24 janvier précédant, que les colons portaient des armes pour se protéger contre les raids des grévistes .  Dans les journées suivant la fusillade, le chef du Parti Néo-Démocrate de l'Ontario, Donald C. MacDonald, allait même jusqu’à affirmer avoir des affidavits qui démontraient que les policiers étaient conscients du fait que  les colons avaient des armes.

Les décédés étaient Irenée et Joseph Fortier (frères) de Palmarolle, Québec et Fernand Drouin de St. Elzéar.  Irenée Fortier avait 34 ans, était marié et avait 2 enfants. Son frère Joseph avait 25 ans et était aussi marié.  Fernand Drouin était un célibataire de 29 ans. Les blessés étaient Harry Bernard, Ovila Bernard, Joseph Boily, Alex Hachez, Albert Martel, Joseph Mercier, Léo Ouimette et Daniel Tremblay.  Les décédés ont été transportés à leur village de naissance pour les funérailles.

Les 20 colons avaient été arrêtés sur place par les policiers présents et 14 armes à feux avaient été saisies. Il y avait 3 fusils de calibre 12, 2 carabines de calibre 30-30, 5 carabines de calibre .22, 2 carabines de calibre .303 (carabines Lee-Enfield, surplus de la Deuxième Guerre Mondiale), 1 carabine de calibre .30-06 et 1 pistolet Smith & Wesson de calibre .38.

Les 20 colons avaient été accusés initialement, le 11 février, de l'utilisation d'armes avec l'intention de blesser pour  ensuite tous être libérés sous caution de 500$ chacun.  Mais quelques jours plus tard la Couronne a placé de nouvelles accusations contre les colons; ils étaient maintenant accusés de trois chefs d'accusation de meurtre non capital.  Un chef d'accusation de meurtre non capital impliquait à l’époque que, si l'accusé était trouvé coupable, il allait seulement au pénitencier et ne pouvait pas être condamné à la pendaison.  La distinction entre le meurtre capital et le meurtre non capital a été éliminée quand le gouvernement fédéral a aboli la peine de mort du Code criminel, le 14 juillet, 1976.

La journée après que les nouveaux chefs d'accusation avaient été déposés, tous les colons, sauf un, s'étaient rendus à la police et avaient été transportés à la prison provinciale à Haileybury pour attendre leur procès. Le seul colon qui ne s'était pas rendu était Paul-Émile Coulombe, le gérant de la Coopérative de Val-Rita.  Au début, la police croyait que Coulombe s'était enfui et un mandat d'arrestation d'envergure nationale avait été émis.  Mais il avait simplement transporté son épouse malade à l'hôpital de Montréal.  Il est revenu à Kapuskasing le 15 février et s'est aussitôt rendu à la police à la maison de son avocat, Me Gérard Cloutier. Cloutier était l'assistant de l'avocat renommé de Toronto, Me Joseph Haffey, responsable pour la défense légale des colons. Entre-temps les grévistes avaient eux aussi des démêlés avec la police.

Après l'incident à Reesor Siding, le Procureur Général, Fred Cass, a envoyé 200 policiers de la Police Provinciale pour assister les 25 déjà en poste à Kapuskasing.  Des mandats d'arrestation avaient été émis pour 237 grévistes sur un chef d'accusation d'avoir participé à une émeute. Les grévistes et les dirigeants de la section locale 2995 ont coopéré avec la police et, par le 15 février, 181 grévistes s'étaient rendus à la police et avaient été transportés à Monteith, un ancien camp pour prisonniers de guerre, à environ deux heures et demi de route de Kapuskasing, converti en pénitencier provincial.  Les grévistes n'ont pas eu à attendre longtemps en prison; le quartier général de l'International Union of Carpenters and Joiners à Washington D.C., aux États-Unis, a payé 200$ par gréviste pour leur libération sous caution. Mais le syndicat n'était pas seulement préoccupé avec les problèmes juridiques des grévistes, il avait encore des négociations de grève à faire.

Le 10 février, le médiateur désigné, M. Bora Lakin, avait dirigé sa première réunion entre des représentants de la Spruce Falls/Kimberly-Clark et des représentants de la LSWU. La délégation de la LSWU avait à sa tête  confrère Joseph Laforce, président de la section locale 2995 de Kapuskasing. Quand la fusillade a eu lieu le 11 février, les négociateurs avaient été surpris, surtout Laforce qui n'avait pas été informé qu'un raid sur Reesor Siding allait avoir lieu. La fusillade a donné une nouvelle urgence aux négociations.

Immédiatement après la fusillade la direction des négociations a été prise en main par le Ministre du Travail provincial, Leslie Rowntree.  Le jeudi, 14 février, après 19 heures de pourparlers ininterrompus, une solution à la grève a été proposée. Le premier point de la solution était que les négociations pour une entente collective seraient séparées; la Spruce Falls de Kapuskasing et Kimberly-Clark de Longlac allaient négocier individuellement avec la LSWU.  Ensuite deux comités d'arbitrage seraient formés (un pour la Spruce Falls et un pour la Kimberly-Clark) pour négocier des ententes de travail. Chaque comité d'arbitrage serait composé d’un représentant du syndicat, un de la compagnie en question et un du Département du Travail provincial.  En attendant que les nouvelles ententes soient négociées les bûcherons devaient retourner au travail avec les salaires qu'ils avaient sous le contrat de 1962.  Mais avant que cette solution ne soit adoptée les grévistes devaient voter pour l'accepter.

Les vendredi 15 février et samedi 16 février la solution a été présentée aux syndiqués de Longlac et Kapuskasing. Ensuite le vote a été pris. A Longlac seulement 230 grévistes sur 400 avaient voté (58% des membres). Le résultat a été de 217 pour la solution et 13 contre. A Kapuskasing 784 grévistes sur 1100 avaient voté (71% des membres). Le résultat ici était de 733 pour la solution et 55 contre. La solution a donc été acceptée et les hommes sont retournés au travail immédiatement mais cette solution ne faisait pas plaisir à tout le monde.

Confrère Joseph Laforce et l'exécutif du LSWU avaient accepté la solution simplement parce que le gouvernement de l'Ontario avait menacé de légiférer pour obliger le retour au travail des bûcherons si la solution n'était pas acceptée. En acceptant la solution, le syndicat pouvait participer à la rédaction de l'entente collective par l'entremise des comités d'arbitrage alors que dans une entente légiférée par le gouvernement, le syndicat n'aurait eu aucune participation.  De plus, Laforce a dit que l'utilisation du processus législatif pour résoudre un conflit de travail aurait créé un précédent légal dangereux.  Ce précédent aurait sûrement menacé le mouvement syndical en Ontario, donc Laforce et le LSWU ne voulaient pas être à la source de cette menace.

La grève était terminée mais il restait encore les procès juridiques de 20 colons pour meurtre non-capital et de 254 grévistes pour avoir fait un rassemblement illégal (initialement le chef d'accusation s'appliquait seulement à 237 grévistes et était pour émeute).  Au procès des grévistes, 138 avaient été trouvés coupables et chacun d’eux a reçu une amende de 200$, amendes qui ont par la suite été payées par le International Union of Carpenters and Joiners, le syndicat mère de la LSWU.

Le procès des colons quant à lui, a eu lieu au mois d'octobre 1963 dans une cour provinciale du District de Cochrane (dans la ville de Cochrane). Le juge pour ce procès était J.C. McRuer, Juge en chef de la Cour Suprême de l'Ontario. Ce procès à Cochrane était simplement une audience préliminaire visant à déterminer si les colons devaient subir des procès pour meurtre.  Après que les témoignages et les preuves aient été présentés, le jury de 7 hommes s'était retiré et a délibéré pendant 2 jours et demi. La décision du jury a été que, faute de preuves, les colons ne devaient pas subir de procès pour meurtre et devaient être libérés inconditionnellement.  Par contre, le juge McRuer, a trouvé que 3 des colons, soit; Paul-Emile Coulombe, Léonce Tremblay et Héribert Murray, étaient coupables de possession d'une arme dangereuse.  Il leur a imposé une amende de 100$ chacun.